(Un article sur un sujet similaire a été soumis à l’Association canadienne des orthophonistes et audiologistes)
Angela Roberts-South
Phoniatre
Centre d’excellence de la Fondation Parkinson du Canada, Centre des sciences de la santé de London
Doctorante, École des sciences et des troubles de la communication
Université de Western Ontario
London (Ontario)
Il est admis que l’exercice fait partie d’un mode vie sain. Ces derniers temps, des chercheurs ont étudié la mesure dans laquelle l’exercice est réellement capable de prévenir et de ralentir la progression de la maladie de Parkinson.
Le rôle de l’exercice fait traditionnellement partie du domaine de la physiothérapie, de l’ergothérapie et des soins infirmiers. De nouvelles études laissent cependant croire que l’exercice pourrait jouer un rôle dans l’amélioration de fonctions habituellement ciblées par l’orthophonie, comme la cognition, le langage, la voix et la déglutition, chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson.
Cognition et langage
Les troubles cognitifs sont un symptôme de la maladie de Parkinson qui a d’importants effets sur la qualité de vie. Il arrive qu’une détérioration cognitive survienne tôt en début de maladie et qu’elle précède même les symptômes moteurs. Cette détérioration peut avoir des répercussions évidentes sur les fonctions du langage, et elle est particulièrement perceptible dans les activités simultanées, comme marcher et parler en même temps.
Bien que des études montrent que l’exercice est bénéfique pour la cognition chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, il n’existe à ce jour d’essais cliniques randomisés permettant de savoir ce qu’il en est dans les cas de maladie de Parkinson. De rares études fournissent cependant quelques indices sur les bienfaits possibles de l’exercice sur la cognition et le langage chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson.
- Nocera et coll. (2010) font état du cas d’une femme atteinte de la maladie de Parkinson qui a montré une amélioration des fonctions cognitives et du langage après un programme d’exercice qui consistait à faire 20 minutes de vélo stationnaire trois fois par semaine durant huit semaines. Outre des gains importants de la fonction exécutive, de la mémoire à court terme et de la fluidité verbale, les chercheurs ont signalé des améliorations du langage (une communication plus efficace, par exemple). Le sujet produisait moins d’erreurs grammaticales et a montré une diminution impressionnante des interruptions dans l’élocution et des expressions de remplissage (p. ex. « euh »; « hum »), ce qui pourrait signifier une réduction des difficultés à retrouver ses mots.
- Dans une étude publiée par Cruise et coll. (2011), 34 personnes atteintes de la maladie de Parkinson ont été réparties entre un groupe d’exercice et un groupe témoin. Le groupe d’exercice a participé à des séances d’exercice de 60 minutes (entraînement cardiovasculaire et de la force musculaire) deux fois par semaine. Les chercheurs signalent que le groupe d’exercice a montré des gains dans les fonctions cognitives et du langage, comme la mémoire spatiale à court terme, la fluidité verbale et la fluidité sémantique, répondant aux critères statistiques de bienfait clinique substantiel.
Ces études laissent croire à un bienfait possible de l’exercice général sur la cognition et le langage qui mérite un examen plus poussé.
Voix et déglutition
Les problèmes de voix et de déglutition sont courants chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Aucune étude n’a été publiée sur l’effet de programmes d’exercice physique général, comme l’entraînement cardiovasculaire et de la force musculaire, sur l’amélioration de la voix et de la déglutition chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Cependant, Russell et coll. (2010) ont publié une excellente étude générale sur les programmes d’exercice ciblé dans les cas de maladie de Parkinson. Les programmes d’exercice physique général ne ciblent pas de groupes musculaires ou moteurs particuliers. Russell et coll. ont défini l’exercice physique ciblé comme étant l’« activation systématique, répétée et contrôlée de groupes de muscles spécifiques pour des séquences particulières d’actions guidées par des buts ».
- La méthode Lee-Silverman pour le traitement de la voix (LSVT) est probablement le programme d’exercice ciblé dont il est le plus souvent question. Il s’agit d’un programme d’exercice intensif exécuté par un thérapeute reconnu par le programme LSVT. Cela suppose de suivre un protocole prescrit d’exercices et de stimuli ciblant le larynx, le système respiratoire et la bouche. De nombreuses études font état des bienfaits de la méthode LSVT sur l’intensité de la voix. Une étude récente laisse croire que la méthode LSVT pourrait également aider la déglutition (Sharkawi et coll., 2002).
- L’entraînement de la force musculaire expiratoire (EMST), mis au point par la Pre Christine Sapienza, est un autre programme d’exercice ciblé. (Les muscles expiratoires sont utilisés pour tousser.) L’EMST a recours à un appareil spécialement mis au point et à un programme d’exercice prescrit pour améliorer la fonction des muscles expiratoires, ce qui pourrait améliorer la respiration et la déglutition chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson (Saleem et coll. 2005; Pitts et coll. 2009; Troche et coll. 2010). Bien que l’EMST nécessite un appareil spécial, il peut facilement être pratiqué sans supervision à la maison. Il est nécessaire qu’un thérapeute calibre l’appareil, et évalue ou rétablisse les cibles thérapeutiques.
Outre la documentation sur la méthode LSVT et l’EMST, il existe peu de documentation sur les programmes d’exercice ciblé et systématique pour la voix et la déglutition chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. La littérature spécialisée fait état d’autres programmes d’exercice, mais ces programmes n’ont pas réussi à atteindre les gains attendus ou à démontrer la possibilité de transfert aux activités fonctionnelles. Par conséquent, les professionnels de la santé ont de la difficulté à les appliquer efficacement dans des conditions cliniques.
Résumé
Il existe un manque de données sur les bienfaits des programmes d’exercice pour la cognition, le langage, la voix et la déglutition chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Les cibles, l’intensité et la durée des exercices diffèrent dans les études examinées, mais des programmes d’exercice/conditionnement physique général ont entraîné des améliorations prometteuses de la cognition et du langage. En outre, certains programmes d’exercice ciblé semblent montrer des bienfaits.
Les programmes d’exercice physique ne sont pas souvent pris en compte par l’orthophonie traditionnelle dans les cas de maladie de Parkinson. Il est cependant possible, à mesure que d’autres études sont réalisées, que les orthophonistes aient à approfondir leurs connaissances de l’élaboration et de la mise en œuvre de programmes d’exercice ciblé, et des bienfaits complémentaires de l’exercice physique général afin de les intégrer aux plans de traitement des personnes atteintes de la maladie de Parkinson.