« Vous auriez dû me voir à l’époque. Je m’assoyais sur le hayon de la voiture familiale avec le plus jeune assis sur mes genoux. Mon fils cadet filait à toute allure sur son tricycle et nous regardions mon fils aîné jouer au baseball tout en l’encourageant », se remémore Cindy Smith, évoquant le temps vécu avec ses trois jeunes fils pendant que son conjoint, Tim, était en déplacement avec la marine. Cela se passait juste avant qu’elle apprenne qu’elle était atteinte de la maladie de Parkinson, à l’âge de 35 ans.
En 1996, elle a consulté son médecin de famille en raison de secousses à un doigt de la main gauche. Elle croyait qu’un muscle ou un tendon était peut-être déréglé. Elle a été étonnée lorsque son médecin l’a dirigée vers un neurologue. Le spécialiste lui a dit savoir qu’elle était atteinte de la maladie de Parkinson, en observant sa démarche et le mouvement restreint de ses bras lorsqu’elle est entrée dans son cabinet. Il n’existe aucune analyse sanguine simple ni aucun autre outil diagnostique permettant de confirmer le diagnostic. On lui a fait subir plusieurs examens, y compris un examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM), pour écarter toute autre possibilité.
« J’étais abasourdie », dit Cindy. « Je ne savais pas grand-chose sur la maladie de Parkinson, mis à part le fait que c’était une maladie qui frappait les personnes âgées.»
Au cours des deux premières années suivant le diagnostic, Cindy ne prenait aucun médicament et poursuivait sa vie de mère occupée dont le conjoint était dans la marine. À l’époque, elle éprouvait peu de symptômes ayant une incidence sur son mode de vie. Elle a éventuellement commencé à prendre de la lévodopa et, quatre ans plus tard, la famille a quitté Dartmouth pour s’installer à Hilden, près de la famille de Cindy, et son conjoint, Tim, a trouvé un emploi à terre.
« Nous savions que j’aurais éventuellement besoin d’une aide accrue », dit-elle. Son fils aîné, Tim, mentionne que le déménagement n’a pas été trop difficile pour les enfants, puisqu’ils étaient encore très jeunes et avaient déjà des amis à leur nouvelle école étant donné que plusieurs de leurs cousins la fréquentaient.
Mis à part la famille rapprochée et les amis, Cindy n’a pas révélé sa maladie à son entourage et n’avait pas à en informer un employeur. Elle et son conjoint ont cependant annoncé le diagnostic de Cindy à leurs enfants, en s’efforçant de ne pas en faire tout un plat. Son fils Tim se souvient toutefois de cette annonce.
« Je me souviens que nos parents nous ont parlé, alors que nous traversions tous ensemble le pont en voiture, de la possibilité que maman soit atteinte de la maladie de Parkinson, ajoutant qu’elle devait cependant subir d’autres examens. Je crois que j’avais environ huit ans. J’ai entendu le mot “maladie” et je savais que c’était grave. Mes parents nous ont expliqué les effets que cette maladie pourrait avoir, et que maman pourrait avoir de légers tremblements. Cela était effrayant », indique Tim.
La maladie de Cindy a évolué relativement lentement et son fils Tim confirme que la maladie de Parkinson dont leur mère était atteinte a eu peu de répercussions sur la vie quotidienne des trois garçons. « Nous étions très occupés à l’époque », dit Cindy. « Les garçons faisaient partie des castors, des louveteaux et des scouts; ils participaient à des sports et fréquentaient l’école. Nous avions de nombreuses activités. Chacun s’attelait à la tâche et Tim ne prenait plus la mer. Il m’apporte toujours une grande aide. Nous poursuivions tout simplement notre vie. »
Elle faisait constamment des blagues au sujet de ses tremblements, mentionne son fils Tim. « Elle menaçait de nous couper les cheveux elle-même, si nous nous comportions mal. Et à la quincaillerie, elle disait aux employés en plaisantant qu’ils devraient l’embaucher pour mélanger la peinture au lieu d’utiliser le mélangeur. »
Cindy a participé à un groupe de soutien pour les personnes atteintes de la maladie de Parkinson – une fois. Elle était de loin la plus jeune du groupe, et la plupart des participants se déplaçaient au moyen d’ambulateurs ou de fauteuils roulants, ce qu’elle trouvait tout simplement effrayant et démoralisant. (Note de l’auteur : Parkinson Canada compte aujourd’hui des groupes de soutien expressément destinés aux personnes atteintes de la forme précoce de la maladie de Parkinson [FPMP].)
Lorsque Cindy est arrivée à l’âge de 50 ans et était aux prises avec la maladie depuis deux décennies, il lui était de plus en plus difficile d’y faire face. Elle prenait des comprimés toutes les deux heures pour soulager ses symptômes. « Je disposais de très peu de temps pour vaquer à mes occupations. Je pouvais prendre une douche, ou pendre quelques vêtements à la corde à linge, ou peler des pommes de terre. J’entreprenais une tâche et je devais demander à quelqu’un de la terminer. Certaines nuits, je devais réveiller Tim pour qu’il m’aide à me déplacer dans le lit afin de m’installer confortablement. Je ne pouvais me déplacer seule », dit-elle.
Éventuellement, Cindy a été inscrite sur une liste d’attente en vue de subir une intervention appelée « stimulation cérébrale profonde » (SCP). Il s’agit d’une chirurgie au cerveau qui est pratiquée pendant que le patient est éveillé; elle consiste à implanter des électrodes de stimulation dans un endroit précis du cerveau. La pile qui transmet la tension aux stimulateurs est implantée dans le thorax (comme un stimulateur cardiaque). Cindy conserve dans son sac à main la télécommande servant à ajuster la tension que la pile transmet au cerveau.
Cindy a subi deux interventions au printemps 2012, dont l’une visant son côté gauche, suivie de la seconde intervention trois semaines plus tard pour le côté droit. « On m’a rasé la tête et on l’a enduite d’une solution désinfectante orange », dit Cindy. « C’était quelque chose à voir. Le neurochirurgien avait le sens de l’humour et je me souviens qu’il m’a dit, après m’avoir ouvert le crâne, “Eh bien, Cindy, vous avez là un joli cerveau” ». Cindy a continué de plaisanter avec lui tout au long de l’intervention. « Je devais continuellement répéter mon nom et mon adresse pendant qu’il travaillait. Je disais parfois un autre nom ou une autre adresse, juste pour détendre l’atmosphère. »
Une fois que le dispositif de stimulation a été calibré, Cindy a connu une période un peu difficile. Elle prenait toujours ses médicaments. Elle raconte avoir effectué la « danse des canards » dans un restaurant alors qu’elle était sous l’effet combiné des médicaments et de la SCP. Le neurologue était enchanté, dit Cindy. Cela signifiait que l’intervention chirurgicale avait été couronnée de succès puisque Cindy était surstimulée par les effets combinés des médicaments et de la SCP. Cindy a pu ensuite cesser de prendre les médicaments sur les instructions de son neurologue.
« L’intervention chirurgicale valait totalement le risque. J’ai éprouvé très peu de symptômes et je n’ai pris aucun médicament pendant quelques années. » Malheureusement, la SCP n’empêche pas la maladie d’évoluer. Cindy prend maintenant certains médicaments et est aux prises avec d’autres problèmes de santé, mais elle se sent tout de même mieux qu’avant l’intervention.
Cindy attribue sa capacité de faire face à cette maladie complexe à son sens de l’humour, au soutien qu’elle reçoit de la part de sa famille, plus particulièrement son conjoint Tim et ses trois fils, ainsi qu’à celui de la famille formée des membres de l’église qu’elle fréquente. Elle s’inquiète cependant de l’avenir, surtout de l’apparition possible d’une démence, un des symptômes courants de la maladie de Parkinson, en particulier aux stades avancés.
En attendant, Cindy est reconnaissante des recherches qui ont donné lieu à la mise au point de médicaments et de traitements, comme la SCP, qui ont amélioré sa qualité de vie. Elle attend avec impatience la découverte d’un remède à la maladie de Parkinson. Pour le moment, elle jouit du temps qu’elle passe avec ses fils devenus adultes et son petit-fils Morgan. En tant que grand-mère, elle ne fait que rire lorsque son fils Tim, qui a maintenant lui-même un jeune fils, lui demande comment elle arrivait à tout faire lorsqu’ils étaient jeunes.